Phénoménologie de la rationalité moderne : universalisme et dynamique de particularisation. La diversalité comme achèvement de la modernité
Il est courant d'en venir à la compréhension
de la rationalité moderne dans les termes de l'autofondation, de la
subjectivation ou l'avènement de la subjectivité ; on la pense comme instance
fondatrice par excellence contre la cosmologie gréco-scholastique enfermant le
« sujet » dans la totalité finie ou infinie du monde où le sujet ne fut qu'un
élément parmi les éléments du monde. Il est aussi courant de penser la
rationalité moderne selon la prétention à l'universel qui caractérise cette
posture fondatrice qui se veut position d'un point de vue de l'universel « bon
sens » qui reste ce que nous partageons en commun. Enfin, il revient
constamment, dans une perspective critique de présenter la rationalité moderne,
visée dans sa dimension technicienne, comme une faculté instrumentalisante
rendant l'homme « maître et possesseur de la nature », selon le vœu fondamental
de Descartes.
En ce sens, la rationalité moderne se présente
sur l'aspect double de la faculté « réfléchissante » et calculatrice. Qu'elle
soit mobilisée dans la compréhension du monde, de l'organisation du
vivre-ensemble des hommes, ou dans la perspective d'une transformation
technicienne du monde, la rationalité moderne se pose comme seule instance
légitime de fonder la relation de l'homme au monde, de l'homme à lui-même.
C'est aussi à l'aune de cette légitimation
rationnelle que les autres cultures sont mesurées. C'est dire que la
rationalité moderne procède à une exigence universalisante instrumentale en
même temps qu'elle institue en-deçà ou par-delà de cet universalisme une
différenciation, des formes d'extériorisation où se déploie sa dimension instrumentalisante.
En ce sens, il y aura lieu de souligner comment la rationalité moderne est
frappée d'une contradiction performative liée à cet universalisme posé d'un «
lieu » lui donnant une force particularisante et une posture qui produit des «
différences ».
Nous expliquons cette force extériorisante de
la rationalité moderne d'une part par sa manière de se poser dans sa conquête
de la nature comme lieu marqué d'une logique aveugle compréhensible et d'un
débordement inouï échappant à la
pondération de la raison. A côté de cette extériorisation de la nature ou du
naturel, nous assistons à la différenciation des cultures non-européennes,
liées à la nature où la raison exerce aussi sa supériorité technicienne. Toute
cette dynamique se manifeste selon le critère fondamentalement postulé que la
raison reste l'instance fondamentale de l'humanité : son exercice témoigne de
l'humanité de l'indvidu ou de la collectivité qui s'en sert.
En effet, le constat d'une rationalité moderne
caractérisée par une prétention à l'universel et par une dynamique d'exception
ou d'extériorisation par la naturalisation des êtres nous invite à proposer
d'abord une compréhension de la rationalité moderne dans les termes du paradoxe
de la rationalité qui prend la forme suivante : la raison se déploie toujours
en posant une altérité infériorisée qui devient l'instance nourricière de son
déploiement. Au fond, nous retrouvons une telle dynamique duelle dans la
phénoménologie hégélienne de la raison où la nature représente le vis-à-vis qui
favorise le déploiement de la raison. A partir de ce constat
historico-conceptuel, nous pourrons poser que le propre de la rationalité
moderne est de se poser en s'opposant selon les exigences de l'universalisme
paradoxal, en ce que celui-ci finit toujours par produire, par impuissance à
réaliser ses promesses d'universalisation, des différences « réifiées » et
dominées au nom des valeurs de la raison qui représentent en même temps les
valeurs du progrès et de la civilisation..
Cette position oppositionnelle se manifeste de
manière hétérogène ou hétéroclite. C'est-à-dire qu'il ne faut pas croire qu'une
telle rationalité ayant pris naissance en Europe a institué du même coup toute
l'Europe en terre d'incarnation de la raison, même s'il faut se démarquer ici
de Hegel, de Husserl et de Patocka[1]. Si
nous rencontrons cette idée chez Hegel qui reconnaît que l'Esprit trouve son
véritable épanouissement en Europe, après s'être levé à l'Est (à l'Orient), il
faut croire que politiquement la raison comme faculté de l'universel ne fut pas
la possession de tous les Européens. Tel fut le cas du paysan, du vagabond, du
fou, etc. Ainsi, à l'intérieur de l'Europe la rationalité ne consistait pas
moins à instituer des régimes d'altérité qu'elle est appelée à ordonner selon
la logique de l'enfermement et de l'identification. La méthode thérapeutique
n'est-elle pas la technique de guérison dont la finalité est de faire advenir
un « identique », sujet transparent à soi-même et en adéquation au social ? Le
fou qui est posé comme autre par la raison est appelé à être guéri afin
d'entrer dans l'ordre de la raison et de la légitimité[2].
S'il ne faut pas confondre les colonies sous
le mode de la « folie », il faut par ailleurs soutenir qu'elles représentaient
une des manières d'altérisation de la rationalité moderne, à la fois dans sa
dimension d'exploitation mercantiliste et son projet éthique de libération[3]. Les
terres coloniales représentent l'autre des puissances coloniales européennes
qui sont appelées à les conduire vers la « civilisation », vers des pratiques
rationnelles de gouvernement de soi et des autres. En ce sens, le sens propre
qui se dégage de la raison est la tentative de se gouverner soi-même
s'autorisant à gouverner les autres. La rationalité moderne est celle de la
maîtrise de soi donnant lieu à la maîtrise des autres selon encore une fois la
prétention universaliste. C'est la dualité de la capacité réfléchissante et
instrumentalisante de la raison qui se trouve explicitée d'un autre point de
vue, celui de l'organisation politique.
Cette dualité est présente chez plusieurs
auteurs contemporains, particulièrement Habermas[4], qui
en vient à la critique de la rationalité stratégique au regard de la l'agir
communicationnel qui représente la face émancipatrice de la raison : c'est la
critique du travail comme condition de lien stratégique et du langage
impliquant une prise en compte éthique de l'altérité avec laquelle on s'entend
préalablement[5]. Par
ailleurs, en dehors de la pensée critique qui a voulu mettre en doute le
caractère unilatéral de la capacité émancipatrice de la raison, la pensée
moderne se veut un hymne à la rationalité moderne entendue comme condition de
l'émancipation par le progrès technique susceptible de faire advenir le progrès
moral. Ainsi la rationalité moderne devient synonyme du progrès, de la
civilisation et de l'émancipation de l'humanité[6].
Réduire la rationalité à sa dimension
réfléchissante où l'on procède à une critique des formes de domination au
profit des idéaux de l'émancipation, c'est en maintenir une lecture réductrice
tout en gommant sa dimension instrumentalisante, telle que le reconnaissent
Horkheimer et Adorno, dans la Dialectique
de la raison que l'on peut comprendre comme le diagnostic de la dualité de
la raison qui est à la fois faculté d'émancipation et de domination,
d'ordonnancement et d'extériorisation, de civilisation et de naturalisation. Un
tel processus est aussi propre aux dynamiques internes des sociétés européennes
qu'à la relation de l'Europe à ses colonies et à la dynamique sociale,
anthropologique interne de ces colonies. Et selon ce processus paradoxal, c'est
le sens de l'universalisme qu'il revient de fixer.
Du point de vue de la phénoménologie,
l'universalisme de la rationalité moderne comprend une tension entre le
particularisme de l'espace-temps de formulation des exigences de la raison et
l'idéal universaliste de la raison par-delà les cultures. Ainsi la rationalité
moderne est entravée entre la politique de la différenciation et l'éthique de
l'universalisation. Politique de la différenciation qui consiste à poser et
traquer des différences. Ethique de l'universalisation qui s'inscrit dans la
promesse d'un autre d'égalité à venir. Toute l'histoire de la rationalité
moderne est l'histoire de cette tension[7] :
tension entre l'humanité et l'esclave, entre l'universalité des droits et les
droits censitaires, le refus des votes aux femmes et des enfants ; souveraineté
des peuples européens et colonisation.
Or c'est au regard de cette tension qu'il
importe de relire l'histoire de la rationalité moderne qui est aussi l'histoire
de l'Europe ou de l'Occident. En ce sens, il importe d'intégrer dans cette
histoire l'autre dimension qui est souvent gommée au profit de l'idéal du
progrès et de l'émancipation des Lumières : les particularités politiques,
religieuses et culturelles ou ethniques qui ont été évacuées au profit d'un
universalisme niveleur. Pour ce faire, nous interprétons l'émergence d'un
ensemble d'études dites postcoloniales
comme souci de ces « autres » cultures ou sociétés de parachever
l'universalisme de la rationalité moderne qui, par sa prétention séculaire à
s'imposer, se refuse à toutes tentatives venues d'ailleurs. Les études postcoloniales marquées par ce souci de provincialiser l'Europe ou l'Occident ne
sont qu'une manière maladroite de parachever un universalisme qui fut oublié
comme universalisation d'un particularisme en lui donnant une formulation
ontologique racialiste. Paradoxalement, ce souci de proposer une pensée du
dépassement, pour s'enfermer dans la prétention universaliste de la raison,
remet en chantier le souci de la rationalité moderne : instituer un ordre
universaliste de la raison.
C'est au regard de ce cadre d'explication
qu'il faut comprendre les dynamiques multiculturelles ou identitaires qui se
posent aux sociétés dites multiculturelles qui sont dans la grande majorité des
cas les anciennes métropoles européennes ou occidentales. La demande de prise
en compte des identités différentes n'est autre que l'acceptation de cette
différenciation instituée préalablement par les Européens. Dans cette
perspective, les questions de la diversité, qui restent aussi les questions de
l'identification et de la différenciation, renvoient à la correction de la
posture de la rationalité moderne se posant en s'opposant. Nous voyons la
difficulté éprouvée par les Occidentaux à répondre de manière adéquate aux
exigences de reconnaissance faites par les « minorités », vestiges des
anciennes colonies qui, par un effet de boomerang, occupent les lieux
d'extériorisation des anciennes puissances coloniales. Par ailleurs, cette
lutte pour la reconnaissance menée par les études
postcoloniales procédant par la dénonciation de l'universalisme européen ou
occidental comme particularisme, se veut une manière de proposer une autre
forme d'universalisme. Ce qui laisse voir l'effet pervers que peut produire la
lutte contre l'universalisme particulariste au nom de l'universalisme donnant à
un particularisme à prétention universaliste, cette fois venue de la «
périphérie ». C'est en vérité là que se
pose le problème de ces études dites postcoloniales, c'est aussi là qu'il faut
creuser pour saisir le défi que pose à l'intelligence l'exigence d'un
universalisme qui est appelé à dépasser les particularismes.
Dès lors, la critique ne devra pas seulement
viser l'Europe ou l'Occident comme lieux de domination. Aussi c'est le retour
de la domination au sein même de l'émancipation. Il est loin de penser la
question de la rationalité du seul point de vue d'une Europe prédatrice des
colonies. La prédation a ses effets au cœur des sociétés européennes dans les
figures du salariat, de l'ouvrier, dans l'expérience générale de la réification et que les critiques que
posent les demandes de reconnaissance ne sont pas moins l'autre figure de la
raison moderne qui porte l'émancipation de l'homme comme idéalité fondamentale
du vivre-ensemble. Et la domination est produite dans les sociétés
postcoloniales sans nécessairement qu'il y ait besoin de voir la présence d'une
puissance européenne. Donc il faut en finir, dans la perspective postcoloniale,
à une critique fragmentée de la rationalité moderne pour saisir ce qui est
inhérent au projet universalisant, qu'il soit dans la perspective d'une
provincialisation.
Selon ce tour d'horizon historico-conceptuel,
nous sommes interpelé par la question de la modalité d'une histoire unitaire de
la rationalité moderne : comment penser la rationalité moderne en intégrant les
extériorités qui ont été inventées par elle ? Il s'agit de penser à la
faisabilité de cette histoire à une voix, celle de la raison moderne et de
plusieurs résonances, celles des modes de gestion coloniale, de celle des
ouvriers européens. Il s'agira, dans ce cas, de penser une histoire à plusieurs
résonances. Il s'agira de penser ces résonances selon les exigences de la
rationalité moderne. C'est dire que l'histoire de la rationalité moderne doit
être lue selon la plurivocité des exigences venues des minorités dont le sens
profond reste un accomplissement de l'idéal de la raison : la prise en compte
de la spécificité de soi comme condition de ses droits. A partir de cette
plurivocité des exigences, nous comprendrons que la raison moderne (postmoderne
?) ne saurait plus être pensée selon les seules exigences de la rationalité
moderne qui les avait enfermées dans les formes de domination et de dénégation.
Au regard de cette histoire autre (nouvelle)
de la rationalité moderne laissant voir l'existence d'une pluralité de voi(e)x
exigeant la prise en compte des identités laminées au cours des colonisations,
nous poserons la question de l'ordre politique, social des sociétés
contemporaines, marquées par la pluralité de « rationalités». Donc nous nous
trouvons en face d'une rationalité éclatée, rhizomatique. Sans vouloir
reprendre le débat sur la postmodernité comme parachèvement de la modernité,
nous pensons que la nouvelle configuration qui s'impose aux sociétés
multiculturelles appelle une autre manière de penser l'institution de la
rationalité, une autre manière de penser la raison. D'abord, il faudra se
défaire de la conviction que la rationalité moderne est univoque, qu'elle
serait le lieu de normativité des sociétés européennes et non-européennes.
Ensuite, ces réserves établies, il faudra revenir à l'idée d'une pluralité de
rationalités porteuses de normativités et d'idéalités différentes. C'est à ce
niveau qu'il faudra nous interroger sur la manière de penser cette pluralité de
la rationalité donnant lieu à une « guerre des valeurs » ou guerre des dieux.
Guerre des dieux qu'il faut prendre à la lettre dans le cas de la pluralité des
religions embrassant une pluralité de « dieux ». Comment penser la rationalité
dans un contexte de pluralité des normes, telle est la question qui nous
préoccupera ?
Dans le contexte de pluralité des normes
fondées d'une part sur les expériences coloniales de la domination au nom de la
raison, il est important de formuler l'hypothèse de l'institution des
rationalités en résonnance (rationalité dialoguante) qui, elle, est appelée à
faire advenir une idéalité de la raison comme réalité à instituer, plutôt
qu'une réalité dont, étant déjà instituée, il faut partir.
La méthode que nous mettrons en œuvre pour
entreprendre cette lecture de l'histoire de la rationalité moderne sera celle
d'un diagnostic historico-conceptuel consistant à présenter les modes de
déploiement de cette rationalité selon leur constitution conceptuelle : il sera
question pour nous de mobiliser une démarche proche de l'histoire des idées et
de l'archéologie foucaldienne. Cette méthode consistera à suivre la récurrence conceptuelle
de la rationalité moderne dans l'histoire philosophique et politique de
l'Occident.
Par-delà le diagnostic qui sonde le malaise ou
le mal-être dans l'histoire moderne, il y a lieu de dégager l'idéalité
implicite à ce travail de diagnostic. La mise en perspective de cette idéalité
consiste à entreprendre un travail plus critique des formes de rationalité à l'œuvre
dans les revendications identitaires des minorités, de la démarche expéditive
des politiques dites de la diversité qui s'enferment dans une hantise de la
rationalité surplombante de la modernité dont nous avons montré le mode
d'institution dans l'histoire de l'Europe.
Enfin, notre travail présentera plusieurs
enjeux théoriques et pratiques. Les enjeux théoriques consistent à présenter une
autre perspective sur l'histoire de la rationalité moderne où sera intégrée la
colonisation, le procès d'extériorisation ou d'exception comme modalité
intrinsèque de la rationalité moderne.
Ensuite, cette lecture historique présentera de manière empirique la
dualité ou le paradoxe qui a constamment travaillé la rationalité moderne prise
entre l'universalisme proclamé et le particularisme politique vécu. Enfin, nous
en viendrons à un nouveau concept de la rationalité qui aura pour eidétique la pluralité, et pour modalité
d'institution de la résonance dans le dialogue (la résonance est davantage
portée sur les ententes en écho dans le dialogue que sur le dialogue pris pour
lui-même). Il s'agira de penser un universalisme non surplombant, mais
dialogique que nous désignerons de « diversel », institué selon l'entente
tendue qui résone dans la dynamique du dialogue, où le fondement ne doit pas
être posé mais produit par une mise en
relation patiente des modes d'être au monde portés par les communautés
culturelles ou ethniques, religieuses, raciales ou génériques. Les enjeux
pratiques portent sur les formes du vivre-ensemble : il sera question de
proposer des modes d'organisation du vivre-ensemble non selon la logique
surplombante de la rationalité gouvernementale -on parle avec enthousiasme
aujourd'hui de « gouvernance »- qui est en même temps la forme de rationalité
de la « majorité », mais la mise en jeu des formes de normativité dans une
dynamique d'échange conflictuel ou non d'où peuvent advenir des normativités
partagées.
C'est ce que nous appellerons la politique diverselle dont l'objectif est
de rendre possible la pluralité sans origines partagées par tous les citoyens,
qui caractérise les sociétés multiculturelles, et qui représente pour nous la
figure achevée d'un ordre universaliste par la mise en résonnance des «
diversités ». Nous entendons par diversel
ou diversalité, le mode de manifestation de la diversité en tant qu'elle
fissure l'origine (la traditionnalité, l'ancestralité, etc.) dans des origines
donnant lieu à plusieurs formes de rationalité et de normativité. Ainsi une
politique diverselle se donne pour objet cette tension entre les genres, les
groupes ethniques, etc., de manière à faire venir un régime de rationalité
capable d'accueillir l'altérité au-delà de toute tentative d'enrégimentement.
Enfin, nous nous intéresserons à penser la nouvelle figure (celle de la
transitance[8]) que
devra prendre la citoyenneté défaite de la « nationalité », modalité de la
rationalité moderne européenne, qui est le privilège politico-juridique de
l'Européen.
Edelyn DORISMOND
Docteur en Philosophie,
Directeur de Programme au Collège International
de Philosophie
Professeur au Campus Henry Christophe de
Limonade-UEH.
Directeur scientifique de CAEC-Centre d'Appui à
l'Education à la Citoyenneté
Membre
du Laboratoire LADIREP
[1] . Une telle idée de l'Europe comme « cap »,
lieu d'incarnation de la raison, on la retrouve chez la dernière Husserl
dans « La crise de la conscience
européenne ». Et Patocka également en tant qu'héritier de Husserl. Derrida est
l'un des rares philosophes européens à avoir combattu cette idée et développé
aussi l'idée de l'Europe comme « Cap » a
ses contreparties. Cette manière de penser l'Europe comme « cap » sous-entend
que l'Europe est comparable au loup, en ce sens qu'elle déchire et mange ses
altérités. Jacques Derrida, L'autre Cap, Paris,
Editions de Minuit, 1991.
[2] Nous
pourrons avoir recours à souhait à l'analyse de Michel Foucault dans L'histoire de la folie à l'âge classique
où il expose la thèse de la production de la folie par la raison et des
mécanismes mis en place pour se protéger contre cette altérité dangereuse.
[3] En
effet, la rationalité moderne a pris une formulation contradictoire dans son
discours sur l'asservissement des Indiens et des Africains. Nous retrouvons
cette contradiction dans les prises de position de Las Casas qui défendit les
Indiens et demanda en même temps l'asservissement des Noirs. Les
Abolitionnistes n'auraient pas une position moins contradictoire, eux qui
combattirent l'esclavage tout en considérant que les Noirs doivent être
émancipés progressivement.
[6] Même
quand nous aurons à revenir sur l'idée émise par Habermas pour qui le projet de
l'émancipation des Lumières est inachevé en montrant que le paradoxe est au cœur
même de l'universalisme Jürgen Habermas,
« La modernité : un projet inachevé » in Critique, 1981, T.XXXVII, no 413, p.958).
[7] Cette
tension est résumée par Etienne Balibar à travers ce concept, la « synecdoque
universelle », sur lequel nous reviendrons pour en exploiter la force créatrice
pour penser ce que nous nommons le paradoxe de l'universalisme de la
rationalité moderne.
[8] Voir Edelyn
Dorismond, «Créolisation de la politique, politique de la
créolisation. Penser un im-pensé dans l'oeuvre de Glissant», In
Cahiers Sens Public, 2009/n°11-12, pp137-146.
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